GUS 25 Mai 2014

GUS

comédie en 7 tableaux

de Gianmarco Toto

 

 

Personnages :

 

  • Gus (le chien) 
  • Fracasse et Bonbon (clowns, amis de Gus) 
  • "Les Equilibros », acrobates
  • Lumino (jongleur de lumière)
  • Mysterios et ses deux Miss Teria
  • Loyal (Le directeur du cirque)
  • Amer (clown rival de Fracasse et Bonbon)

 

 

TABLEAU 1

 

(Fracasse et Bonbon entrent.)

 

Fracasse : - Cher public.

Bonbon : - Mesdames et messieurs les transcripteurs…

Fracasse : - Spectateurs, Bonbon… Spectateurs…

Bonbon : - Mesdames et messieurs les percolateurs.

Fracasse : - Spectateurs !

Bonbon : - …Perforateurs !

Fracasse : (Plus fort.) – Spectateurs !

Bonbon : - Les Obturateurs…!

Fracasse : - (Encore plus fort.)Les spectateurs !

Bonbon : - (Agacé.)Oui, ça va, j’ai compris. Arrête de hurler, comme ça, tu vas lui faire peur.

Fracasse : - A qui ?

Bonbon : - A l’autre, là, qui nous attend à côté ?

Fracasse : (Maîtrisant ses nerfs et poursuivant au public.)– Mesdames et messieurs, Bonbon et moi-même Fracasse avons le plaisir de vous présenter notre ami et partenaire de numéro, j’ai nommé, le chien Gus.

 

(On fait entrer Gus sous les applaudissements.)

 

Fracasse : - Je devine, à votre air surpris, que vous ne vous attendiez pas à voir…

Bonbon : - …un chien.

Fracasse : - (Après avoir jeté un œil sévère à Bonbon.)…Un chien, oui, c’est ce que j’allais dire. Un chien, mais pas n’importe quel chien. Car Gus est un…

Bonbon : - …Chien savant. Très savant mais alors, très, très, très… Même que… (Voyant que Fracasse le regarde d’un sale œil, il se ravise.) Savant, quoi…

Fracasse : - Oui, savant, messieurs, dames. Mais Gus est aussi notre ami parce qu’il est…

Bonbon : - …Doux. Mais il est doux, mais doux. Doudou, tout doudou, le petit toutou… (Voyant que Fracasse bout de rage, il se ravise en reculant craintif.)Hou là ! Lui, il n’est pas doux. L’est pas comme Gus qui est doudou, tellement doux que…

Fracasse : - Vous l’aurez compris, Gus est une boule de tendresse poilue.

Bonbon : - Oh, c’est joli ça.

Fracasse : - Quoi encore ! Qu’est-ce que tu voulais nous dire de si important ?

Bonbon : - Rien… Que c’est joli : « …boule de tendresse poilue… » tout ça, quoi. C’est vrai… (A Gus.) C’est une bouboule de poil, ça, hein ? Bouboule de poils doudou, toudoux, kiki, kikou, kikoudoudou, roudoudou…

Fracasse : (Hurlant après Bonbon.) Ce n’est pas fini ton cinéma ?

 

(Amer entre l’air hautain et méprisant.)

 

Amer : - Bonjour, Fracasse Bonbon !

Fracasse : (Vexé.) - Fracasse…

Bonbon : (Même jeu.) - …Et Bonbon !

Amer : - Pardon, môssieur, pardon ! (En insistant sur le « et ».) Fracasse et Bonbon !

Fracasse et Bonbon : (Prenant aussi un air emprunté.)– Bonjour, Môssieur Amer, bonjour.

Amer : - Vous avez amené votre machin à poils à ce que je vois.

Fracasse : - Gus, il s’appelle Gus. Et attention c’est…

Bonbon : - …Un chien savant.

Fracasse : - Il comprend tout. Absolument tout.

Amer : - Ah, oui ? Et bien faites-le sortir pour le faire entrer, pour voir.

Bonbon : - (Ne comprenant pas la phrase d’Amer.)Faites-le sortir… Pour l’entrer sans voir ? Non… Faites-le pourrir pour voir qu’il sorte à l’entrée…? Non…

Fracasse : - (Agacé à Bonbon.)– Tu arrêtes ça ou c’est toi que je sors…

Bonbon : - Mais j’ai pas compris sa phrase à l’autre, là !

Amer : - L’autre, il a un nom. L’autre, il s’appelle Amer.

Bonbon : - Il sape sa mère ?

Amer : (Agacé à son tour.)– Non. Amer, je m’appelle Amer.

Fracasse : - Bien, môssieur Amer, nous allons vous montrer que Gus peut entrer seul en scène. Bonbon, tu sors avec Gus et au signal, fais-le entrer en scène.

Bonbon : (A Gus en sortant avec lui.)Allez, viens Gus. On va lui montrer à Samère de quoi tu es capable…

Amer : - Amer, je m’appelle Amer…

Bonbon : - Oui, ça va, j’ai compris, Tamère.

Fracasse : (A Amer qui boue de rage.)– C’est agaçant, hein ? Mais c’est Bonbon, ça.

Amer : - Oui, ça va lui coûter, Bonbon.

Fracasse : - Pour l’instant c’est vous qui allez rester baba lorsque vous verrez de quoi est capable Gus. (A Bonbon en coulisses.)Bonbon, tu es prêt ?

Bonbon : (Ne laissant entrevoir que la moitié de torse du rideau.) – Oui, je suis tout près, pourquoi ? Tu veux que je m’éloigne ?

Fracasse : (Agacé.)– Mais non, triple buse, prêt, prêt à y aller, à faire entrer Gus !

Bonbon : (Disparaissant en coulisses.) – Ah, d’accord. Prêt, oui, je suis prêt…

Fracasse : - Bien, alors, attention, roulements de tambours !

 

(Après un silence ou rien ne se passe Fracasse commande un nouveau roulement de tambour.)

 

Fracasse : - Roulements de tambours !

Bonbon : (Il entre timidement en aboyant.) – Ouah, ouah ! Ouif ! Waouf !

Fracasse : - Mais, saperlipopette, qu’est-ce tu fais Bonbon ?

Bonbon : - Et ben, sapulamoquette, je fais le chien.

Fracasse : - Mais Gus, où est Gus ?

Bonbon : (Faisant mine d’être surpris.) – Oh, ben, sapeurapipette, c’est vrai ça, où qu’il est, hein ?

Fracasse : (Soupçonneux.)– Toi, tu me caches quelque chose.

Bonbon : - Moi ? Oh, rien.

Fracasse : - C’est vrai ce mensonge ?

Bonbon : - Juré, craché, pété,…

Fracasse : - C’est donc un mensonge. Avoue !

Bonbon : (Craquant comme un criminel repenti.)– Oui, j’avoue. J’avoue tout. Quand j’avais cinq ans, je m’ai évadé parce que je savais qu’un jour je « mourirai »…

Fracasse : - C’est pas très français tout ça.

Bonbon : - Oui, je suis pas français, je l’avoue. Je suis africain du côté mon père, chinois du côté de ma mère, Suisse par ma grand-mère et ma bicyclette est auvergnate. Je suis un sans-papier qui n’a plus pieds. Je coule.

Fracasse : - Arrête de faire le pitre et dis-moi tout.

Bonbon : - Gus a disparu.

Amer : - Pfff ! J’en étais sûr. Gus n’est pas un chien savant. C’est du pipeau tout ça.

Fracasse (En colère à Amer.) :

- Saperlopipo ! Je vous interdis de dire ça !(A bonbon.)Toi, j’attends des explications.

Bonbon : - C’est pas de ma faute. D’abord j’étais là avec Gus. On attendait pour entrer. Après, tu m’appelles, alors j’étais là et Gus, là-bas. Puis après, tu m’engueules et je me mets là mais Gus l’était plus là.

Amer : - C’est bien ce que je dis, un chien savant n’aurait jamais fait ça.

Fracasse : - Vous, vous m’agacez l’Amer.

Loyal : (Entrant affolé.) Allons, allons, mes amis, mais que se passe-t-il ?

Fracasse : - Gus a disparu, Loyal. Et sans Gus…

Bonbon : - … Kaput le numéro.

Amer : - Et oui, kaput, le numéro.

Fracasse : - Hou, qu’il m’agace, celui-là. Mais il m’agace…

Bonbon : - Oui, il nous scagasse, lui.

Loyal : - Bon et bien si Gus n’est pas là, enchainons, enchainons. On ne peut tout de même pas faire attendre le public.

Fracasse : - Mais Gus…

Loyal : (Au public.)Mesdames et messieurs, applaudissements et encouragements pour nos clowns qui vont vaillamment tâcher de retrouver leur ami Gus. Et maintenant, nous allons vibrer aux surprenantes prouesses de nos acrobates, j’ai nommé l’extraordinaire quatuor des Equilibros. Applaudissements !

 

TABLEAU 2

 

(Les Equilibros font leur entrée en scène et enchainent une série d’acrobaties complètement ratées.)

 

Loyal : - Stop ! Stop ! Arrêtez, arrêtez ça tout de suite ! Mais enfin, les Equilibros qu’est-ce qui vous arrive ?

Amer : (Cynique.) - Les « Equilibros » ne sont plus si équilibrés qu’auparavant.

Equilibro : - Veuillez nous excuser cher public…

Equilibro : - …Et vous aussi, Loyal. Mais nous n’arrivons plus à nous tenir en équilibre…

Loyal : - Mais enfin, ce n’est pas possible. Qu’allons-nous dire aux spectateurs ?

Equilibro : - Je ne sais pas, moi, dites-leur que nous sommes malades…

Equilibro : - …Que nous sommes contaminés par une virus étrange qui frappe parfois les acrobates…

Loyal : - Impossible. Totalement impossible. Et la raison, je vous prie…

Equilibro : - Nous avons appris la disparition de Gus, l’ami de Fracasse et Bonbon…

Loyal : - Et alors ?

Equilibro : - Ben, c’est à dire que nous aussi on l’aimait bien Gus…

Equilibro : - …Alors, nous sommes tristes…

Equilibro : - …Et nous n’arrivons plus à nous concentrer…

Equilibro : - …Et nous perdons l’équilibre pour un oui ou pour un non…

Equilibro : - … Nous ne pouvons plus tenir l’équilibre correctement…

Fracasse : - Vous voyez ? Vous voyez ? Qu’est-ce que je vous disais ? Faut absolument retrouver Gus…

Loyal : (A Fracasse.) - Vous m’irritez, vous, avec votre cabot. Si ça se trouve, il est allé faire ses affaires dans un coin comme n’importe quel autre chien.

Bonbon : - Ah, bon ? Gus a des affaires en cours ? Il est avocat ?

Amer : (A Bonbon avec mépris.) - Non, mais c’est toi qui aurait du disparaître et non pas Gus.

Bonbon : - Qu’est-ce que ça veut dire, ça ?

Amer : - Ca veut dire que tu ne comprends jamais rien de ce que l’on dit. Faire ses affaires, ça veut dire faire ses petites commissions…

Bonbon : - Ah, bon ? Gus avait des courses à faire ?

Amer : - Oh, j’abandonne. Il m’énerve, mais il m’énerve !

Loyal : - Ca veut dire faire son petit pipi, Bonbon.

Fracasse : - Oui, et bien moi, je ne suis pas certain, voyez-vous. Gus demande toujours quand il a envie de faire son petit pipi. Et là, rien, pas un signe, pas un aboiement,…

Loyal : - Bon, quoiqu’il en soit, le spectacle doit continuer. (Au public.) Cher public. Je vous invite, à présent, à accueillir par vos applaudissements, l’incroyable manipulateur de torches, escamoteur de rayons et jongleur de lumière, le surprenant « Lumino » !

 

TABLEAU 3

 

(Lumino, le jongleur de lumière, entre en scène le costume couvert de lampes. Il réalise une danse étrange lorsque soudain, il se met à fureter dans tous les coins.)

 

Lumino : - Psst ! Petit, petit ! Kiki ! Où qu’il est le kiki ?

Loyal : (Voyant que le numéro de Lumino n’avance pas.) Votre numéro, Lumino, votre numéro…

Lumino : - Un instant, je vous prie, je cherche.

Loyal : - Vous cherchez quoi ?

Amer : (Toujours cynique.) - Sa pile. Il est en manque de jus c’est certain…

Loyal : (A Amer.) Oh, vous, ça va avec vos  plaisanteries.

Fracasse : (Méprisant à Amer.)-Laissez, Loyal. Môssieur se croit drôle et spirituel.

Bonbon : - Ouais. C’est ça. Il se croît troll et vermicelle.

Amer : - (Aux deux clowns avec dédain.) Qui vous parle à vous ?

Loyal : - (Aux clowns.) Assez, vous trois ! (A Lumino.) Et vous, vous attendez quoi ? Enchaînez, enchaînez, que diable !

Lumino : - Excusez-moi, Loyal, mais je ne peux pas…

Loyal : - Et pourquoi ça ?

Lumino : - Parce que je suis assombri par de mauvaises pensées.

Loyal : - Allons bon… Tout le monde devient fou dans cette troupe ou quoi ?

Lumino : - C’est que je suis inquiet de ce qui pourrait arriver à Gus si on ne le retrouvait pas.

Loyal : - Ah, mais vous n’allez pas vous y mettre à présent. Pas vous, Lumino,…

Lumino : - Hélas, je crains fort que cela ne m’empêche d’avoir les idées claires.

Equilibro : - Vous voyez, Loyal, nous ne sommes pas les seuls…

Equilibro : - Vous devriez vous faire une raison…

Equilibro : - Nous devrions tous partir en mission…

Equilibro : - Et retrouver notre ami Gus sans sommation…

Lumino : - Désolé, Loyal, vous nous voyez, tous, dans une totale affliction…

Amer : - Moi, je dis que vous devriez tous les renvoyer, Loyal. Ce ne sont pas des artistes dignes de ce cirque.

Fracasse : - Parce que vous, vous croyez que vous êtes digne, peut être ?

Bonbon : - Oui. Parce que vous, vous le croyez, ça, que vous êtes dirque d’être artiste de ce cygne ?

Amer : (A Fracasse avec ironie.) Apprenez déjà, à votre ami Bonbon, à s’exprimer correctement. Ce serait une bonne chose, voyez-vous.

Lumino : - Ah, s’il vous plaît, les clowns, cessez vos disputes. La situation est assez obscure comme ça.

Equilibro : - Oui, tout notre spectacle vacille.

Amer : - Oh, ça va, vous. Quand on est plus capable de tenir debout et bien… Patatras.

Equilibro : - Qu’est-ce que ça veut dire ça « patatras » ?

Amer : - Ca veut dire ce que ça veut dire. Et ce que ça veut dire, c’est que le spectacle est à l’eau.

Bonbon : - Il ne pleut pas pourtant…

Loyal : - Du calme, je vous prie. Restons calme…

Amer : - Annulez, Loyal, annulez le spectacle c’est la seule solution…

Loyal : (En colère.) - Pas question, vous entendez ? Nous allons enchaîner avec le prochain numéro. Et je ne veux plus rien entendre, ni les clowns, ni les acrobates, ni les jongleurs… Et je vous préviens, si l’un d’entre vous s’amuse à renseigner notre magicien sur la disparition de Gus, je le renvoie de ce cirque !

Fracasse : - Mais… (Il se tait soudain lorsque Loyal, menaçant, lève un doigt.)… Ok, ok, poursuivons…

Bonbon : - Mais enfin… (Il se tait soudain lorsque Loyal, menaçant, lève à nouveau son doigt.)… Ok, ok, poursavons…

Fracasse : - …Suivons…

Bonbon : - …Suivons… Sans savon…

Loyal : (Un sourire forcé sur les lèvres.)  - Mesdames et messieurs, à présent, plongeons dans les mystères de l’invisible et de l’étrange avec l’incroyable illusionniste « Mysterio » et ses fidèles assistantes les Miss Teria. 

 

 

 

TABLEAU 4

 

(Mysterio fait une entrée remarquée en faisant apparaître de nulle part ses Miss Teria.)

 

Miss Teria : - Cher spectateur, les mondes invisibles te font peur…

Miss Teria : - …la puissance des esprits t’impressionne…

Miss Teria : - …Tu as souvent la sensation inquiétante que quelqu’un t’observe…

Miss Teria : - … Qu’une présence invisible se trouve, là, juste à côté de toi…

Miss Teria : - …Et bien, tu n’as encore rien vu, fragile spectateur…

Miss Teria : - …Car Mysterio va révéler devant toi les puissances occultes…

Miss Teria : - … Mysterio va ouvrir des portes qu’il vaut mieux laisser closes…

Miss Teria : - … Mysterio va, devant vous, sonder vos esprits et lire la moindre de vos pensées…

Miss Teria : - …Celles que vous cachez dans les abîmes de votre subconscient…

Miss Teria : - …ou celles, plus secrètes, que vous n’osez avouer…

Bonbon : (S’accrochant à la veste de Fracasse.) Fracasse, j’ai peur…

Fracasse : - Ne sois pas stupide, Bonbon, ce n’est qu’un numéro.

Miss Teria : - Mysterio, es-tu prêt ?

Mysterio : - Je suis prêt.

Miss Teria : - Es-tu en communication télépathique avec l’assemblée ici présente ?

Mysterio : - Oui. Je commence à percevoir les pensées de chacun… Mais… Un instant… (Tordu de douleur.) Aïe, ma tête…

Miss Teria : - Mysterio ! Que se passe-t-il ? Qu’est-ce que vous voyez ?

Mysterio : (De plus en plus tordu de douleur.) - Oh ! C’est terrible ! Je vois… Je vois…

Loyal : - Qu’est-ce qu’il est bon ! Ah, ça, il n’y a pas à dire, c’est un bon.

Mysterio : - Silence ! Je perçois la pensée de quelqu’un… Ou plutôt de quelque chose… C’est… Un animal… Un animal, dans cette assemblée, tente d’entrer en contact avec moi… C’est… Oh, mon dieu, un chien…

Bonbon : - C’est Gus ! C’est Gus !

Loyal : - Oh, non, voilà que ça recommence.

Mysterio : - Il est mécontent… Il a un message qui s’adresse à tous les artistes du cirque.

Bonbon : - Qu’est-ce qu’il dit ?

Mysterio : - Attendez, je ne t’entends pas tout. Il aboie trop fort. Ah, ça y est. Il dit qu’il ne supporte plus ces disputes entre vous, ces jalousies,… Il dit que si vous voulez vraiment le retrouver, vous devrez mettre vos talents en commun sinon il se verra dans l’obligation de vous quitter et changer de troupe. Le cirque Ploumploum lui a fait d’ailleurs une proposition très intéressante.

Loyal : - Le cirque Ploumploum ? Alors ça, c’est trop fort ! Ils n’ont qu’à aller les chercher ailleurs, leurs artistes !

Fracasse : - Oh, non ! Gus, mon petit Gus,…

Bonbon : - Hé, c’est aussi mon petit Gus.

Fracasse : - Ne recommence pas à m’agacer, Bonbon, ou sinon…

Mysterio : - Arrêtez. Il aboie dans ma tête, il aboie…

Miss Teria : - Hé, vous, les clowns, vous avez entendu ? Pas de dispute !

Miss Teria : - Fini les disputes ! Compris ?

Fracasse : - C’est compris, c’est compris…

Bonbon : - Pet conscrit… Heu, c’est compris…

 

(Mysterio, épuisé, s’écroule  soudain au sol.)

 

Loyal : - (Courant vers le magicien.) Mysterio ! Ah, seigneur, tout est fini. Le spectacle est fini. Le cirque est fini.

Amer : - N’exagérons rien. Ce n’est qu’un numéro…

Fracasse : - Ah, vous m’agacez, vous avec : « Ce n’est qu’un numéro… »

Loyal : - Assez ! En voilà assez ! Laissez ce brave magicien se remettre de ses émotions.

Mysterio : - Ca va, ça va. Je vais bien. (Mysterio se relève en époussetant son costume.) Alors ? Vous êtes contents ? C’est quand même à cause de vous si Gus s’en est allé. Vous avez entendu ? Je crois que le message était clair. Si vous souhaitez le retrouver, il faudra mettre vos talents en commun. Vous attendez quoi ?

 

TABLEAU 5

 

(Toute la troupe sort paniquée en appelant « Gus » et en s’éparpillant en tous sens.)

(Mysterio, lui, ainsi que ses Miss Teria s’installent pour boire le thé.)

 

Mysterio : - Bon. Et bien nous n’avons plus qu’à attendre.

Miss Teria : - Tu crois qu’ils vont y arriver ?

Miss Teria : - Moi, je n’en suis pas si certaine. Sont mal partis…

Mysterio : - L’important ce n’est pas de partir, c’est de bien arriver. Entre temps, faut trouver le bon chemin.

 

(Bonbon entre à reculons en cherchant.)

 

Bonbon : - Gus ? Gugus ? Où qu’il est le Gusgussounet à son pôpa ?

 

(Fracasse entre à reculons en cherchant.)

 

Fracasse : - Gus ? Gus ? L’est où le kiki à son pépère ? Hein ? Il est où ?

 

(Les deux clowns se cognent dos à dos sans se voir. Puis surpris, ils se fixent d’un air supérieur et se séparent en poursuivant leur recherche.)

 

Mysterio : - Là, par exemple, c’est très mal parti… Enfin,… (Aux Miss Teria.) Un peu plus de lait dans mon thé, s’il vous plaît…

 

(Les Equilibros entrent un à un, forment une pyramide humaine et appellent Gus. Ils vacillent et tombent puis sortent en se chamaillant.)

 

Miss Teria : - Et là, ça ne tient pas debout.

Mysterio : - Vous m’ôtez les mots de la bouche, très chère. Un peu plus de sucre, s’il vous plaît…

 

(Lumino entre à son tour en râlant après ses lampes torches qui ne veulent plus s’allumer à la commande. Puis il sort.)

 

Miss Teria : - Ben dis-donc, lui c’est encore moins une lumière…

Mysterio : - Je ne vous le fait pas dire, ma toute belle.

 

(Enfin, Loyal entre désespéré.)

 

Loyal : - Mon spectacle. Mon beau spectacle. Une catastrophe…

Mysterio : - Quand allez-vous cesser de vous lamenter sur votre spectacle, mon ami ?

Loyal : - Et que voulez-vous que je fasse d’autre ? Tout est fichu.

Miss Teria : - Allons, allons, c’est qui le patron, ici ?

Miss Teria : - Oui, c’est qui ? Hein ? C’est vous, non ?

Miss Teria : - Est-ce que vous croyez que c’est comme ça que doit procéder un directeur de cirque ?

Miss Teria : - Je ne crois pas, non. Au lieu de prendre les problèmes à bras le corps, vous, vous les laissez vous submerger.

Loyal : - Mais que disent-elles ?

Mysterio : - Je crois que les Miss ont raison, Loyal. Gus a bien précisé qu’il était question que tous mettent leurs talents en commun.

Loyal : - Et alors ?

Mysterio : - Et alors, qui est le mieux placé, ici pour révéler les qualités de chacun ?

Loyal : (Comme une révélation.)- Mais, bon sang. Vous avez raison. C’est moi, le mieux placé pour révéler le talent de mes artistes. Le chef de ce cirque, monsieur Loyal. Oh, merci, Mysterio, merci. (Aux Miss Teria.) Merci à vous aussi les Miss. On s’embrasse ?

Miss Teria : - Non, non. On évite.

Miss Teria : - Il n’y a pas le temps. Mieux à faire…

Loyal : - Oui, vous avez raison. Assez perdu de temps. Il faut agir. (Appelant tous les autres.)Venez ! Venez tous ! Les clowns, les acrobates, les jongleurs ! Venez !

 

TABLEAU 6

 

(Tous les artistes entrent sur la piste.)

 

Fracasse : - Loyal ? C’est vous qui hurlez comme ça ?

Bonbon : - Vous avez retrouvé Gus ?

Les Equilibros : - Gus est là ?

Lumino : - Quelqu’un peut-il m’éclairer sur ce qu’il se passe ?

Amer : - Dites, Loyal, ce n’est pas une façon de nous crier dessus comme ça. Nous ne sommes pas vos toutous…

Loyal : (Avec autorité.) – Non, mais je suis votre patron. Si cela vous pose un problème Amer, vous pouvez quitter dès à présent ce cirque !

Amer : - Ca va, j’ai rien dit.

Loyal : - Ecoutez tous. Le message que Mysterio a reçu de Gus était clair mais aveuglés par notre bêtise, nos différents et tout, et tout, nous n’avons pas compris ce qu’il attendait de nous. Nous devons mettre nos talents en commun. Moi, c’est ce que je suis déjà en train de faire.

Lumino : - Oh ! Ca y est, tout devient beaucoup plus clair. Par exemple, je dois utiliser mes lumières mais pas n’importe comment…

Un Equilibro : - Oui, car si tu ne sais pas où regarder, tes lumières ne te montrerons rien.

Un autre Equilibro : - Exact. Et les seuls à pouvoir voir loin…

Un autre Equilibro : - …C’est nous, car nous pouvons nous dresser en équilibre très, très en hauteur…

Un autre Equilibro : - Et donc, voir plus loin que n’importe qui.

Bonbon : - Et nous, on sert à quoi, alors ?

Fracasse : - C’est vrai, ça, on sert à quoi ?

Amer : - Vous, je ne sais pas mais, moi…

Loyal : - Pas à grand chose, si vous vous entêtez à vous disputer comme vous le faites et à ne penser qu’à vous…

Mysterio : - Comment ? Vous osez poser la question ? Mais vous êtes des clowns il me semble, non ?

Fracasse : - Ben, oui, ça pour l’être, nous le sommes…

Amer : - Et même plus, je dirai…

Bonbon : - Oui, nous sommes des clowns…

Mysterio : - Et bien, qu’attend toujours un chien lorsqu’il est notre meilleur ami ?

Fracasse : - Oh, bon sang, mais c’est bien sûr…

Bonbon : - C’est quoi ? Qu’est-ce qui est sûr ?

Amer : - Oui, c’est vrai, on aurait pu y penser avant…

Bonbon : - Penser à quoi ?

Amer et Fracasse : (Agacés à Bonbon.) - A jouer, patate !

Bonbon : - A jouer aux patates ?

 

(Le reste de la troupe rit.) (On entend des aboiements.)

 

Fracasse : - C’est Gus, je l’entends.

Bonbon : - Oui, mais on ne le voit toujours pas.

Amer : - Il ne veut pas encore se montrer.

Loyal : - Poursuivez, les clowns. Jouez ensemble et faites rire tout le monde. Ca fera apparaître Gus. Vous les Acrobates, formez donc une pyramide afin que Lumino grimpe sur vos épaules et éclaire les alentours.

 

(Chacun se prépare et se met en position.)

 

Lumino : - Ca y est, je le vois. Il est prêt des cages aux lions.

Bonbon : - Mais il va se faire bouffer comme une patate !

Mysterio : - Mais non. Si vous le voyez qu’attendez-vous pour aller le chercher ?

Loyal : - Allez, la troupe ! Tous aux cages à lions. Et ramenons Gus parmi nous.

 

(Toute la troupe sort sauf Mysterio et ses Miss Teria.)

 

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